28.6.05

Débat sur Google et la bibliothèque globale à la BPI

La salle était pleine lundi soir à la BPI (environ 150 personnes) pour écouter Matts Carduner, DG de Google France, Bernard Bachman, directeur de la Médiathèque de la Cité des Sciences et de l'industrie, Michel Fingerhut, directeur de la Médiathèque de l'IRCAM et Gilles Le Blanc, professeur d'économie à l'Ecole des Mines discuter du projet Google Print. Le débat fut assez stimulant (plus, en tout cas, que le débat assez caricatural organisé par l'Atelier sur BFM - disponible ici en MP3 : première partie et deuxième partie).

Après une présentation du projet Google Library par Matts Carduner (svp, un autre exemple que "romantisme français" !), chacun des intervenants avait 10 minutes pour réagir. La présentation du DG de Google France n'a hélas pas contribué à clarifier les choses : après un rappel du contexte du projet, il a entremêlé les deux versions de Google Print : Google Library et Google Print. Pourtant quand on consulte le site de Google Library, il est bien précisé que les ouvrages tombés dans le domaine public seront consultables dans leur intégralité ("These public domain books look very similar to publisher-submitted books except you will be able to click through all the pages of the book"). Ce soir-là, il n'a été question que de limites en nombre de pages et en recherche par mois (ce qui est prévu pour la partie "éditeurs", Google Print). Bref, on aurait apprécié en savoir plus sur Google Library (par exemple sur son avancement) puisque c'était le sujet du débat. Ainsi, lorsqu'un bibliothécaire de Paris-V a posé deux questions à mon avis essentielles : à savoir si les accords avec Google Library sont exclusifs (vis-à-vis des autres moteurs de recherche par exemple) et qui est propriétaire des données, Matts Carduner l'a renvoyé vers son chef de projet Google Print.

Si l'on en croit l'accord passé avec l'Université du Michigan, rendu public il y a quelques semaines et qui est sans doute similaire aux autres (voir l'info du 23/06 - une version HTML est également disponible) le côté "non-exclusif" sera limité au site de l'université. J'espère que ceux qui se plaignent de ne pas avoir accès à l'accord auront pris le temps de lire le document. [mise à jour : voir la note du Figoblog sur le sujet]

Les intervenants ont évoqué de nombreux sujets : quid du rôle de médiateur du documentaliste qui ajuste la recherche selon le profil de celui qui la formule ? de la bibliothèque comme espace de sociabilisation ? Google pourra-t-il mener à bien ce projet d'une ampleur incroyable ? Qu'en est-il de la conservation des données sur le long terme ?

Mais j'ai trouvé que c'est Michel Fingerhut qui soulevait les questions les plus intéressantes. Je citerai notamment, en ne pouvant malheureusement pas être exhaustif, ses inquitétudes sur le fait que les formats numériques évoluent et s'entretiennent (qui peut dire quel format sera utilisé dans des dizaines d'années ?), sa perplexité face à la numérisation d'ouvrages anciens (et c'est vrai que la reconnaissance de caractères d'incunables pourra peut-être poser des problèmes !), sur l'intérêt de proposer des "morceaux" d'oeuvres pour lesquelles l'impression coûtera plus cher que l'achat d'un livre, sur la gestion des accès au contenu géré par Google, sur la disparition de la "découverte" avec Google Library et enfin sur les moyens qui seront offerts pour trouver un livre dans la bibliothèque la plus proche (Google Scholar le propose déjà).

On en revient à ce mélange des genres de Google avec ses deux programmes qui s'entrecroisent et qui n'ont pas la même finalité... A suivre donc.

Au-delà du débat, puisque c'était l'occasion de les voir, je vous conseille de lire l'article "Nouvelle économie des contenus, nouvelle utopie", co-écrit par Gilles Le Blanc ou les articles de Michel Fingerhut disponibles sur le site de l'IRCAM, notamment "La numérithèque entre réalités et fantasmes" (écrit en 2000).